jeudi 28 décembre 2017

"L'ailleurs s'étend", de Nicolas Guyot


Une fois n'est pas coutume : je chronique un livre, publié par les éditions Héliotropismes, qui est d'abord dédié à l'image, et plus particulièrement aux images de Nicolas Guyot, des peintures photographiques au bromure d'argent.

Outre l’épaisseur de son papier texturé, cet objet magnifique se caractérise, à mon sens, par le fait que l'image, à travers des rayures, des taches, continue à se manifester en arrière-plan, même quand il y a un texte devant.

Le texte se retrouve donc noyé dans un halo qui peut évoquer les manifestes placardés sur les murs (et aussi la violence d'un monde qui n'a que faire des mots).

En outre, une page sur deux est dédiée à une seule oeuvre plastique, au moins, en partie figurative.

Il y a peu de couleurs aussi, le noir et blanc domine, avec des touches, parfois, de bleu ou de rouge qui ressortent d'autant plus.

Les poèmes publiés dans "L'ailleurs s'étend" sont de Laurent Bouisset, et des poètes guatémaltèques Rosa Chavez, Luis Carlos Pineda, Regina José Galindo (traduits par Laurent Bouisset et Stéphane Chaumet).

Sans ambiguïté aucune, ces poèmes appellent à la résistance et à l'espoir, tout en montrant la dureté du monde (celle de l'Amérique latine et la dureté plus sournoise de notre pays).

Extrait de "L'ailleurs s'étend", ce texte de Rosa Chavez :

"Je couvre de baisers les cicatrices
la peau s'y fait plus forte
les souvenirs y sont visibles
cicatrices de multiples formes et tailles
minuscules sur les lèvres
sur les paupières, dans le regard,
j'aime baiser ces corps qui sont des cartes
ces corps marqués au tranchant du destin
j'aime les cicatrices
car la douleur y a trouvé sa forme
à mesure que la peau neuve a poussé
là où le sang avait coulé
là où il y avait une blessure."

 Je signale que la préface de José Manuel Torres Funes.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "L'ailleurs s'étend", de Nicolas Guyot, qui est vendu au prix de 22 €, rendez-vous sur le site des éditions : http://www.heliotropismes.com/

Et si vous souhaitez mieux connaître les œuvres de Nicolas Guyot, voici le lien de son site  : www.nicolasguyot.com

mardi 26 décembre 2017

"L'oreille arrachée", de Florent Toniello


71e volume de la collection "Bookleg" des éditions Maelstrom, "L'oreille arrachée", de Florent Toniello est un recueil de quatre poèmes (en prose pour le dernier) et une épitaphe, au titre énigmatique.

Sous titré "Bruxelles se conte histoires urbaines à dire", "L'oreille arrachée" se propose en fait de ressusciter quelques-uns des morts du cimetière du Dieweg, qui se situe dans la commune bruxelloise.

La référence à la "Spoon River Anthology", d'Edgar Lee Masters, est explicite, puisqu'un fragment de ce cycle de poèmes, où est résumée la vie de gens morts, figure en liminaire.

Il faut dire qu'il y a beaucoup de travail à les ressusciter, ces morts, car les photographies montrent des tombes en piteux état, la nature reprenant ses droits sur la pierre.

Ainsi, ce texte se caractérise par son caractère résolument narratif, l'auteur se faufilant sous la pierre et prenant la place de ces disparus pour résumer leur vie.

On y croise donc l'histoire détaillée d'un (riche) négociant en vin trompé par sa femme, d'un chasseur victime d'un accident mortel, d'une artiste très années folles, et d'un cobaye envoyé dans l'espace avant de revenir en boomerang dans sa tombe terrienne.

Le style de Florent Foniello est puissant (le nombre des pieds des vers se rapproche plus de l'alexandrin que du haïku), on s'y croit, dans ces histoires, toute séparation entre passé et présent est abolie.

Si je puis dire, l'écriture de l'auteur se caractérise par ces chutes qui tuent. Comme, par exemple, dans l'épitaphe de "Le temple du sommeil" :

"Oui j'ai pêché
j'ai trahi, j'ai vécu
j'ai aimé et j'ai tué
j'ai rimaillé aussi
faites de même
l'entretien des cimetières
est une notion toute subjective."

Autre extrait de "L'oreille arrachée", la première strophe de "Lyre noire" :

"J'ai dans mon temps caressé le dos de mille amants rasés de près
reçu les faveurs de mille maîtresses aux joues poudrées
j'ai joui sur des draps du jour dans des palaces où les
boys m'appelaient par mon prénom qu'ils faisaient précéder
de madame
les fourmis dans ma tête on titillé de leurs pattes les
interrupteurs de ma conscience
sur des airs de danse endiablés
lorsque je descendais d'un trait les cocktails vénéneux des
bars du centre-ville"

Les photographies (dont celle de couverture) sont de l'auteur.

Pour en savoir plus sur "L'oreille arrachée", de Florent Toniello, qui est vendu au prix de 3 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, Maelstrom : http://www.maelstromrevolution.org/

samedi 23 décembre 2017

"De gras et de nerf", de Grégoire Damon


Publié par les éditions "Le pédalo ivre", "De gras et du nerf", de Grégoire Damon, est un très bon recueil.

Si je me contente de dire ça, la critique ne sera guère motivée. Donc, je vais m’efforcer d'expliquer au plus juste ce que j'ai aimé dans ce livre. Beaucoup de choses.

D'abord sa lucidité, le refus de se laisser prendre au piège des vessies pour des lanternes. ça ne change peut-être rien, mais c'est important, pour moi, de toujours le montrer. Pour pas perdre de vue l'essentiel. ça, c'est le nerf  et la puissance de style !

Ensuite, "De gras et de nerf" parle du monde urbain actuel, qui est quand-même celui dans lequel vivent les trois quarts des personnes. 

Ce monde-là n'est pas non plus envisagé derrière le tamis rassurant de la culture et du livre, ou des références littéraires. ça, c'est rare !

Donc, c'est du direct et il n'y a pas d'exception élitiste là-dedans.

Enfin, si ce monde actuel est décrit par le prisme du travail, il n'est pas question que du monde du travail dans les bureaux. Il est question aussi, et par exemple, des petits boulots manuels répétitifs, des pauses travail qui ne changent rien au fait que tout cela soit subi, des trajets de travail.

Au-delà de ça, encore, l'originalité de "De gras et de nerf" réside dans le fait que le monde décrit n'est pas autocentré, comme un monde "classique" de poète, mais au contraire constamment décentré.

Grégoire Damon semble aimer mettre en opposition plusieurs points de vue, ce qui complexifie le poème, le rend aussi plus vivant et plus poétique, en un mot, plus vrai. Car ces points de vue qui s'entrechoquent, n'ont pas forcément grand chose à voir les uns avec les autres et constituent un écho multiplié de la réalité.

J'ai l'impression de lire là un recueil en stéréo, d'avoir une vision du monde spatiale, et d'ailleurs, il suffit d'observer la mise en page des textes : plusieurs styles de caractères employés (majuscules, italiques), centrage du texte, apparition de colonnes à certains endroits.

Les gens parlent dans ces textes !

Enfin, les poèmes qui comprennent plusieurs pages sont réellement construits, tout en semblant voguer au hasard des circonstances.

Alors, en définitive, s'agit-il bien de poèmes ? La question me semble d'autant plus dépassée qu'à mes yeux, il s'agit déjà de poésie.

Extrait de "De gras et de nerf" de Grégoire Damon, "Cancers" (un texte, pour le coup, qui se distingue formellement de ceux décrits auparavant, mais qui montre bien l'ambiance du livre) :

"Qu'ils m'enlèvent la langue, je continuerai à chanter. Que ce soit dit. Tissus ou pas tissus j'aurai toujours des dents pour faire du morse.

Qu'ils m'enlèvent les dents, la mâchoire et la gomme, je n'aurai pas un geste de protestation. Mais je brancherai ma glotte sur votre compteur électrique.

Qu'ils m'enlèvent la peau, je laisserai mes tendons et mes muscles à disposition. Les petits enfants s'amuseront à souiller vos beaux tapis d'Orient avec ma couenne et mes abats.

Qu'ils m'enlèvent le nerf, je voudrais voir ça. Je me ferai accrocher au-dessus de l'entrée du métro et vous tinterai à la gueule chaque rame qui passe.

Qu'ils m'enlèvent les os, je viendrai la nuit hanter vos coins de fenêtres. Vos filles à peine pubères feront des cauchemars atroces. J'en ferai vos ennemies.

Enfin ils finiront bien par inventer une machine. Mais, quand ils m'enlèveront l'âme, je trouverai un moyen pour vous rester dans un coin de l’œil, oh oui.

Et votre vie mal éveillée ne sera plus qu'un lundi matin éternel."

Si  vous souhaitez en savoir plus sur "De gras et de nerf", de Grégoire Damon, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.lepedaloivre.fr/

samedi 16 décembre 2017

"Poème bleu", de Samaël Steiner



Publié par les éditions Théâtrales, « Poème bleu » de Samaël Steiner est le troisième livre édité de son auteur.

Le texte qui donne son nom à ce court volume - « Poème bleu » - est précédé de « Nikhol », série de dix tableaux, entre lesquels s'interposent trois discours.

Cette pièce de théâtre possède elle-même un sous-titre, intitulé « Nikhol sous la surface de l'eau ».

Bien que l'écriture formelle des deux parties de ce poème dramatique diffère, en définitive, elles appartiennent bien au même cycle, puisqu'elles mettent en scène un unique personnage féminin, qui s'appelle Macha, et que la seconde partie est la suite de la première.

Il n'en demeure pas moins que l'auteur cherche toujours à brouiller les pistes : multiplicité de titres, comme énumérés plus haut, plusieurs noms qui reviennent, même s'ils ne désignent pas les mêmes choses : l'adolescente Macha, mais aussi, Nikhol, nom de l'entreprise familiale, qui devient presque le nom d'une personne.

Mais aussi : coexistence de plusieurs formes d'écriture : textes sans sauts de ligne, seulement séparés d'un slash, dans la première partie, puis monologue de Macha dans la deuxième partie.

En résumé, ces indices fuyants contribuent à l'image du titre : "poème bleu", comme l'eau, comme cet élément fluide qui glisse et s'enfuit, comme les séquences d'un même temps qui s’enchaînent, jamais tout à fait les mêmes et pourtant si semblables.

Voilà ce que nous donnent à voir les images d'un même film, ce même film.

Ici, la poésie est d'apparence narrative, et semble raconter une saga familiale, attachée à la fois à son île (symbole de chaleur immédiate) et à Saint-Pétersbourg (symbole de froid légendaire).

Même si ce rapport est le fait du hasard, l'histoire de Macha m'a rappelé celle de « Frankie Adams », récit de Carson McCullers, qui raconte aussi l'histoire d'une adolescente qui ressemble à s'y méprendre à son auteur.

C'est dire combien Samaël Steiner restitue bien ce que peut être le passage délicat de l’adolescence, avec sa soif de découvertes, et aussi, sa sensibilité à fleur de peau.

Au-delà du sujet apparent de ce livre, j'y ai bien sûr retrouvé les caractéristiques de l'écriture de son auteur, à savoir cette attention aux choses concrètes (loin des poètes lyriques hélas de tradition), ce désir de les voir complètement, de les toucher.

Et la poésie, plutôt que d'images fabriquées par le poète, naît de la juxtaposition d'images semblant tout d'abord réelles puis devenant ensuite irréelles. Ainsi, comme dit le grand-père de ce livre : "l'exactitude est une erreur de distance".

Extrait de « Poème bleu », de Samaêl Steiner :

« Jamais encore elle n'avait plongé seule / personne ne l'accompagne / elle a marché depuis la maison / la combinaison sous ses vêtements / comme une deuxième peau / elle pose son sac / la petite plage est déserte / se déshabille / se prépare / avec sa mère elle a pris l'habitude de chaque détail / elle sait précisément comment et où elle doit aller / sa mère ne s'est pas levée / ce matin / avec elle / la petite plage est déserte / elle n'a personne sur qui fixer les yeux / personne à observer pour comprendre / alors elle regarde le reste / cette portion de monde / autour / qui partage avec elle ce début de jour / elle sent un cri / à l'intérieur / qui voudrait dire / immensité – enfance – monde où es-tu ? - le silence m'empêche de vivre heureuse – quelque chose commence – je quitte la forêt – je voudrais traverser / avant qu'il sorte elle plonge / la surface ne se referme pas tout à fait / elle a accroché la longe au harnais / et à l'autre bout / à l’anneau scellé dans le bloc sur la plage / elle a plongé trop vite / ou trop tôt / sans attendre celles qui restent à la surface / assises sur la table / qui veillent au temps / au bon déroulement / elles arrivent / voient la corde tendue / comprennent / s'assoient avec colère / regardent la mer / tirent la corde / Macha comprend / tire la corde à son tour / deux coups / la journée commence / elles sourient / regardent la mer ».

« Poème bleu » de Samaël Steiner a obtenu en 2017 le Prix Jean-Jacques Lerrant des Journées de Lyon des Auteurs de Théâtre et a été mis en espace à la Médiathèque de Vaise à Lyon le 2 décembre dernier. Une lecture de ce texte aura lieu lors de la nuit de la lecture à Marseille, le 20 janvier 2018.

Le livre sera disponible en librairie à partir du 18 janvier prochain.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Poème bleu », de Samaël Steiner, qui est vendu au prix de      10 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, Théâtrales : http://www.editionstheatrales.fr/

lundi 11 décembre 2017

"Et les mégots du ciel", de Thomas Grison et Jean-Marc Thévenin


Publié par les éditions du Contentieux, « Et les mégots du ciel », de Thomas Grison et Jean-Marc Thévenin est un match de ping-pong de poèmes, tous en vers libres, et dont la longueur varie entre 25 et 50 vers.

Il est impossible de trouver un thème à ce livre, et ce n'est pas forcément grave.

Chacun des deux auteurs est venu avec son style bien trempé, de veine surréaliste, et le résultat est que chacun rebondit sur les évocations de l'autre, enchaînant les variations à partir de là.

Le lecteur pourra reconnaître quelques tendances dans le style de Thomas Grison, plus rond et musical, et dans celui de Jean-Marc Thévenin, légèrement plus déglingué imprévisible.

Pour ma part, cela fait longtemps que je n'avais pas lu de textes à la liberté totale, qui laissent la part belle aux visions, et dans lesquels se trouvent des pépites de vérité, vite digérées par la vitesse de l'écriture.

Extraits de « Et les mégots du ciel », de Thomas Grison et Jean-Marc Thévenin :

« Elles auraient souhaité que je les
branche
si les mots ont un sens
le langage est sexué
voire sexuel
voire un trou dans la tête
où passe du lichen
c'est un mot
qui passe par la bouche
notre trou dans la tête
que sont-ils devenus
les mots
dans leur mille-pattes
d'écriture
on parle de virus
j'y ai vu des insectes
les mouches endormies par la mort
sur un ruban collant
dans la maison près de la Seine
un ruban sexué collant
lorsque l'on parle du piano des saris
avec les mots des notes bariolées
le petit doigt posé
sur le ruban sonore
de la parole qui s'envole
le dessin d'écriture le destin d'écriture
qui sort de la bouche
le lichen un peu vertical un peu gris
un peu la pierre
tu es silence
tu es six lances
dans la campagne et la Seine
pour percer la poitrine
où le cœur ne se connaît
que de ses percements
et les rubans
de toutes les époques
qui s'entrechoquent
ici
pour la pensée et ses orgueils
les propos esthétiques
une façon de dériver
pour que ça brille américain
comme une alliance
et les doigts de la branche
je ne sais pas Thomas
ma tête avec ses trous
ses bosses ?

« le serpent qui se mordait
la queue
la bouche et ses venins
ses mouches
le sourire nain
son vermicelle de louches
et les yeux dans la soupe
les trous velus que l'on cherche à
remplir est-ce
l'orgueil de l'estomac ?
L'aube grise on cherche le soleil
tes mots blancs comme tes
dents dans ta tartine
et le café son marc du matin
le vélin blanc
le chat venu manger
dans la narine
la fiancée des mots du
tomawak
je me souviens Jean-Marc
l'écaille acide
la lumière de tes veines tes venins
comme lorsque tu es venu fumer
devant ma porte
les mots nos antidotes
tombés devant la porte
comme des souches
les méandres des volutes
et le piaillement des oiseaux
des mots tombés du nid
le slip qu'il faut changer avant qu'il
ne jaunisse
c'est la lèvre qui mange l’œil
et l’œil qui mange la lèvre
en cette commissure où Eve
pendait le ruban des mouches
des jaunes d’œuf étalés
griffonnés sur les murs
un lichen écorchant la mémoire
des mots glissant
comme le panier de Moïse
sur les eaux
le mort jeté dans l'océan qui revient
vers la source
et l'océan où se rencontrent enfin
ma Loire et ta Seine
le serpent qui se mord
la queue.

T.G. »

En outre, « Et les mégots du ciel », de Thomas Grison et Jean-Marc Thévenin est préfacé par Eric Simon, la préface de la préface et la 4e de couverture étant de Christine de Rosay.

L'illustration de couverture est de Pascal Ulrich et le frontispice de Michel Marnat.

Si vous souhaitez en savoir sur « Et les mégots du ciel », qui est vendu au prix de 15 €, contact auprès de l'éditeur, Robert Roman : romanrobert60@gmail.com 

"Natures", de Jean-Marc Couvé et Patrick Rana-Perrier


« Natures », de Jean-Marc Couvé, publié en co-édition par les « Cahiers A l'index » et « Editinter », est un livre écrit en collaboration avec Patrick Rana-Perrier.

Ce livre, illustré avec élégance par les photographies en noir et blanc de Patrick Rana-Perrier (dont celle de couverture) constitue un hymne au corps de la femme nue qui est vu dans un décor naturel et suscite l'attrait sexuel.

Je précise, pour celles et ceux qui n'auraient pas compris, qu'il n'y a rien de vulgaire dans ces pages. C'est plutôt le retour à la poésie courtoise du siècle de Ronsard, avec l'écriture si caractéristique de Jean-Marc Couvé, qui contient moult jeux de mots, dans le plus grand respect du corps féminin.

En effet, le style de Jean-Marc Couvé, qui se réfère à l’œuvre d'Alphonse Allais, et qui est assumée par l'auteur, loin d'apporter des calembours et d'alourdir la matière aimée, accentue la douceur de ces apparitions naturistes.
C'est pour moi le tour de force de ce livre.

Quant aux photographies de Patrick Rana-Perrier, elles sont impeccables.

« Natures » est préfacé par Jean-Claude Tardif et postfacé par Georges Chapouthier, qui fait remonter le goût du beau chez l'homme à son attirance pour un partenaire sexuel.

Extrait de « Natures » :

« Île est manne ?…

Il émane
Rayant corps seize entrelacs z'être-anges
d'ombres portées, ces feuilles
où mots d'ailes s'effeuillent

Art brelan d'as tard t'es
tonnant corps en corolle

Arrondi de la chair qui ploie corps – on prend date
Île est : Man Ray, encore
Un clin d’œil photographe ?
Hic et nunc. Un clic et un cliché me renvoie
au corps insondable.
Au soleil d'entre-bras,
chat – l'heur entonne, âme où
rire est propre aux deux sexes »

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Natures", de Jean-Marc Couvé et Patrick Rana-Perrier, qui est vendu au prix de 15 € (+ 4 € de port), vous pouvez contacter Jean-Claude Tardif, qui anime la revue "A l'Index", à l'adresse mail suivante : revue.alindex@free.fr ou l'auteur, Jean-Marc Couvé :jeanmarc.couve@gmail.com

lundi 27 novembre 2017

"Le caractère sacré", de Xavier Frandon


« le caractère sacré » de Xavier Frandon, est son deuxième recueil de poésie, publié cette fois-ci par les Éditions du Cygne, après « L'adieu au Loing », édité par le Citron Gare en 2016.

Assurément, ce livre ne se laisse pas résumer facilement. Il résiste à l'analyse habituelle et sa valeur poétique vient en partie de la richesse de climats qu'il développe, faisant alterner le chaud et le froid, l'ironie et le sérieux, la provocation et la gravité.

Premier constat : comme dans « L'adieu au Loing », « Le caractère sacré » se compose de poèmes mesurés, qui, souvent, sont des sonnets.

Ce format d'écriture convient à merveille à l'auteur qui n'a même pas besoin de faire rimer les mots pour composer des poèmes qui soient en vers que l'on dirait classiques. D'où leur caractère rythmé qui donne au style de Xavier Frandon son originalité inimitable. Pensez-vous : en 2017, des poèmes dont on sent qu'il ne peut s'agir de proses découpées en vers !…

Deuxième constat : derrière la variété et la richesse du champ lexical, en définitive, le lecteur finit par se convaincre que le principal sujet de ces poèmes est la poésie et le poète, ce qui est confirmé par la 4e de couverture.

Mais là où, la plupart du temps, on tombe dans la tautologie primaire, du style « la poésie est la poésie » (bien joué les gars, j'y aurais pas pensé!), avec Xavier Frandon, le lecteur ressent une sincère préoccupation de faire rentrer la poésie dans d'autres mondes que le poétique.

Il y a aussi ce réflexe pour le poète de se planquer, qui sait, par pudeur, derrière la variété de ses mots. On sent toujours ce bougé de l'auteur qui n'a pas envie d'être saisi, ce qui ne peut que plaire à un lecteur peu amoureux des évidences...

Extrait de "Le caractère sacré", de Xavier Frandon :

"Je suis trop matérialiste ce soir pour écrire
Un roman - une buse sur un poteau au bord...
De l'autoroute - un oignon émincé dans sa peau
De discours - mon dieu que je m'en veux de m'étendre !

Si on ne me publie pas, on ne me publie pas
Mes textes, et rien d'autre quand je m'en irai
J'espère aurais-je ce choix de vous dire encore comme
Je vous aime, mes alter ego, mes flashs amers...

Je dis : ;;; la mer, et je dis les oiseaux, ... mais il
Fait nuit, c'est... le soir poussé à sa limite
Et je m'y assagis... à cause de la fatigue.

Il y a peut-être.. un autocrate, qui, de son dédain,
Nous appelle avec raison. S'il le pense... au fond...
Ce soir je pense que la poésie... est très grave."

L'illustration de couverture est de MAAP.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Le caractère sacré », de Xavier Frandon, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, http://wwweditions.ducygne.com/

"Absent présent", de Damien Paisant


Premier recueil de Damien Paisant, publié par les Editions Abordo, « Absent présent » est parfaitement résumé par son titre.

Peu importe qui est l'absent, pour le lecteur.

Ce qui est important, c'est de constater que, tantôt l’absent semble s'oublier, tantôt il semble être recherché par le je du texte. Il n'en reste pas moins que la jonction entre les deux entités ne s'opère jamais.

Divisé en trois parties, ce livre de petit format comprend 50 poèmes, qui sont traversés par un même courant de déni, ou d'obsession éperdue.

Le style de Damien Paisant étonne par ce refus, qui apparaît, de se laisser embarquer par la valse des sentiments, qui servirait de traitement trop facile à la perte.

Le ton est parfois dur. Il arrive aussi que le vocabulaire de la religion soit utilisé, chose assez rare dans la poésie actuelle. Mais ce n'est pas pour susciter la pitié, mais pour éloigner les tentations de facilité.

Il y a enfin dans ces poèmes le refus du trop plein d'images, auxquelles sont préférées des expressions plus abstraites.

Extrait de « Absent présent » :

« Déshabillé par des jours impudiques
j'ai perdu
ce qui me tenait de jeunesse
et qui me protégeait du froid

Aujourd'hui je cherche
à m'habiller autrement

gagnant à mieux connaître
le soleil d'hiver
et ses longues mains
qu'il me tend.

Le salut reste peut-être
un moyen de renaître

un moyen de ne vieillir
qu'en surface

les traits marqués
par une profonde nudité. »


Si vous souhaitez en savoir plus sur « Absent présent », de Damien Paisant, qui est vendu au prix de 9 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, Abordo : http://www.abordo.fr

vendredi 24 novembre 2017

"La vie comme elle va", de Sophie Desseigne

Publié dans la collection Polder de la revue Décharge, "La vie comme elle va", de Sophie Desseigne, est une suite de courts poèmes en vers libres, qui prennent "La vie comme elle va".

En effet, ces poèmes sont écrits à partir de l'observation des personnes rencontrées dans la vie courante ou des scènes vécues au jour le jour.

Même si quelques poèmes sont sans doute un peu trop faciles (mais qui n'en n'écrit pas ?), l'auteur sait parfaitement saisir la poésie d'une situation en la résumant d'un trait.

Et, comme le dit Christian Degoutte dans sa préface, cela va d'ailleurs un peu plus loin : le trait n'est pas extérieur ou superficiel, il peut être également, et par exemple, critique des maladies contemporaines (racisme, intolérance). Bref, ce genre de poèmes qui visent plus juste que de longs discours. Du net qui se lit bien.

Extraits de "La vie comme elle va", de Sophie Desseigne :

"Segmentés détaillés
déportés charniers
sans-papiers déplacés
réfugiés
la solution finale
s'est banalisée."

Et :

"Les âmes blessées reposent
sur un transat au bord de la piscine
elles font des exercices
de retour au monde
parfois l'éclat d'un massif de fleurs
les éblouit par sa beauté
et elles repartent fragiles et trébuchantes
sur le chemin de la vie."

La quatrième de couverture est d'Yves-Jacques Bouin et l'illustration de Virginie Fidon.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "La vie comme elle va", de Sophie Desseigne, qui est vendu au prix de 6 €, rendez-vous sur le site de la revue Décharge : http://www.dechargelarevue.com/-La-collection-Polder-.html

"Un début de réalité", de Marc Guimo

Publié dans la collection Polder de la revue Décharge, "Un début de réalité", premier recueil de poésie de Marc Guimo m'a particulièrement plu, car déjà - ce n'est pas si souvent - il prend place dans la réalité commune : celle du monde du travail.

Même si parfois difficile à supporter, il existe et il ne faudrait donc pas l'oublier dans le décor. Alors, bien sûr, Marc Guimo n'est pas tendre avec lui. Il fustige son hypocrisie congénitale, mais montre comment on peut essayer de résister à ça (sans justement résister !).

Dans "Un début de réalité", l'auteur tient compte également du rôle joué par les nouveaux modes de communication (Internet, ordinateur), enfin, façon de parler, puisque ces modes de communication ont tendance à tenir les hommes un peu plus à distance les uns des autres.

Malgré tout, le monde des écrans peut générer une nouvelle poésie : celle des fantômes, ou des cadavres, celle aussi des raccourcis  qui tuent. Et c'est ce savoir-faire ironique et rempli de dérision que l'auteur nous invite à voir dans "Un début de réalité".

Le style de Marc Guimo est coupant, comme gauchi par les nouvelles technologies, et revêt aussi l'habit abstrait de l'immatériel.

En voilà donc, de la vraie poésie urbaine !

Extrait du recueil : "RDV avec une autre réalité"

"Cet homme a RDV dans un bureau
Ce n'est pas un RDV sympathique ni érotique
Les scénaristes n'avaient pas assez fumé
Et aucun des deux personnages n'avait fumé
Cet homme commençait à le regretter
   profondément
Le problème du RDV mal préparé
Quand on y est
C'est qu'on ne peut pas demander à sortir
Faire une pause
Pour fumer et se détendre
On ne peut pas non plus compter
Sur des drogues plus précises
Qui sont restées dans un tiroir dans un autre
    bureau
On est nu et de plus en plus nu
Quand vient le tour de parler
On a des choses à dire mais il ne faut pas les dire
En 2016, dans 8 m² de bureau en France
On n'est pas en sécurité
On est dans une fiction qui écrase toutes les
   autres
Où la qualité de vie dépend de quelques mots
Certains jouent mieux que d'autres
Comme s'ils étaient nés dans un bureau
Mais cet homme est né à l'ancienne
Il a du mal à donner ce qu'on veut
Il voit d'autres scénarios
Il a envie d'écrire et de réécrire la scène
Ecrire qu’il va sortir du bureau
Sans une seule trace d'écrasement".

La préface de "Un début de réalité" est signée de François-Xavier Farine.

La couverture est de Jaya Suberg.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Un début de réalité", de Marc Guimo, qui est vendu aux prix de 6 €, rendez-vous sur le site de la revue Décharge : http://www.dechargelarevue.com/-La-collection-Polder-.html

mardi 14 novembre 2017

« Le poids du monde », de Marlène Tissot


Publiée en 2014 par les Éditions Lunatique dans sa collection « 36e Deux Sous », puis rééditée en 2017, « Le poids du monde », nouvelle de Marlène Tissot, a obtenu cette année le prix Livresse, décerné par le lycée Corduan de Royan.

Derrière son apparente simplicité de lecture, « Le poids du monde » contient une analyse très fine des entrelacs de la pensée du personnage principal, analyse qui n'a rien d'artificielle et qui s'inscrit dans la réalité vécue.

Du point de vue du style, il n'y a rien à jeter. Tout y est, même l'ambiance.

Ce qui fait plaisir, c'est de constater que cette nouvelle, qui traite du sombre problème contemporain de la misère due au chômage et du déni de soi qu'il provoque, a obtenu un prix décerné par de jeunes lecteurs.

Histoire de dire que personne n'est dupe de la situation actuelle, même si elle n'est pas précisément belle.

Voici comment commence « Le poids du monde », de Marlène Tissot, histoire de vous mettre illico dans le bain.

« Il y a cette petite baraque, là-bas, au milieu d'un jardin abandonné. Les volets sont fermés, certains sont cassés. Une vieille pancarte indique « A VENDRE ». La peinture s'écaille. Personne n'a l'air de s'y intéresser. On la regarde à chaque fois qu'on passe par ici. Lili dit que ce serait chouette une maison comme ça avec un bout de jardin. Ouvrir les fenêtres le matin et ne plus avoir ces foutus entrepôts en guise de paysage. On pourrait même planter un cerisier. Elle sourit. Je ne sais pas comment elle fait pour rêver si facilement, Lili. Moi, je n'y arrive plus depuis longtemps. »

L'illustration de couverture est de l'auteur.

Pour en savoir plus sur « Le poids du monde », de Marlène Tissot, qui est vendu au prix de 5 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, http://www.editions-lunatique.com/marlene-tissot

jeudi 2 novembre 2017

"Les samedis sont au marché", de Thierry Radière

Publié par les éditions « Les Carnets du Dessert de Lune », « Les samedis sont au marché », de Thierry Radière, est un recueil de poèmes en prose inspirés par les étals du marché du samedi, comme son titre l'indique.

N'allez pas croire qu'à chaque texte corresponde son marchand. Le but n'est pas de faire à cette corporation de la publicité, même si cela pourrait presque en tenir lieu parfois.

Les textes regroupent les impressions de l'auteur autour de l'idée d'aller au marché, d'y passer du temps : liste de courses à faire ou ne pas faire, trajet pour y aller, rencontres faites sur les lieux.

L'originalité de ces poèmes en prose est d'agrandir le cercle de la seule vision de l'étal, car, tout en partant de là, s'opèrent des associations d'idées qui font croire à l'immensité du décor, celui-ci prenant les dimensions d'un monde (le monde entier regroupé dans une coque de noix, comme disait Joyce, de mémoire).

Ou bien, le voyage, au lieu de se faire dans l'espace, se fait dans le temps, en direction des souvenirs d'enfance, bien sûr.

Mais plus poétiquement encore, on aime ici passer du coq à l'âne, comme par exemple dans « Le téléphone et l'Inde » :

« Cela fait au moins un an que nous ne l'avions pas revu au marché. C'est vrai j'aurais pu l'appeler si j'avais vraiment voulu avoir de ses nouvelles. Pendant qu'il nous racontait ce qui lui était arrivé, j'étais concerntré sur l'énigme du téléphone que j'avais de plus en plus de mal à décrocher avec le temps. Il avait déménagé, était revenu, puis reparti pour un long voyage en Inde et ça l'avait transformé. Je l'écoutais d'une oreille distraite pnsant sans cesse à mon manque de courage avec le téléphone. L'Inde : soit on adore, soit on détste. C'est un peu comme le télphone, pensais-je. Ce qui l'avait le plus marqué là-bas, c'étaient les morceaux de cortps humains ou animaux flottant à la surface du Gange. Je ne comprenais pas comment j'en étais arrivé à détster donner des coups de fil à mes amis. Les indiens appartiennent à un peuple violent, finit-il par nous dire, mais on ne le dit jamais. »

Autour du marché, l'aventure est plus largement poétique que vécue.

Les illustrations (dont celle de couverture) sont de Virgine Dolle.

Le livre est préfacé par Denis Montebello.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Les samedis sont au marché », de Thierry Radière, qui est vendu au prix de 12 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.dessertdelune.be 

mercredi 20 septembre 2017

"V.H.S. (Very Human Simplement)", de Nicolas Vargas


Dans « V.H.S. (Very Human Simplement) », publié par les éditions Lanskine, Nicolas Vargas dresse le kaléidoscope de son enfance et de sa jeunesse, à remplir tout un cartable.

Dans ce livre, qui emprunte sûrement son nom au support de ces cassettes (vidéo ou pas) héritées de ces temps pas si reculés, il y a un bel inventaire des bêtises qu'on peut faire, des choses qu'on peut aimer, surtout des airs de chansons.

En plus, on n'écrit pas cassettes, mais K7, comme dit l'auteur.

D'ailleurs, les performances orales, traduites par des onomatopées, des polices de caractères différentes, des caractères gras, italiques, ou normaux, ou bien des dessins, des collages, avoisinent les poèmes classiques, sagement déployés en vers.

Ce sont aussi des souvenirs collectifs, avec comme emblème de ces passions communes, le football.

Bref, ce livre est plus détendu que cucul la praline. On y trouve bien traduit ce qui fait l'esprit de la jeunesse, l'art de toucher à tout, de tout essayer sans avoir l'air.

Extrait de « V.H.S. (Very Human Simplement) », et pour vous donner une idée de l’ambiance :

« MA PISTE AUX ETOILES

Mon grand-père trouvait sa cabane les yeux fermés
son fils ce héros a abattu de sang-froid et pour son bien un faon orphelin
sa femme détroussait les lapins comme des chaussettes
Corinne faisait la moule mieux qu’au resto
pendant qu’Hervé conduisait le tracteur à 10 ans

Papa meilleur vendeur félicité par maman Shiva
mord l’oreille du caniche
les frangins champions d’Armagnac-Bigorre boivent du Synthol
et Sébastien joue en équipe Une à Sémeac.

Pitou et Toto descendaient une quille de rouge et de jaune chaque soir
le feu père de Stéphane avait bu un Perrier cul-sec
tandis que Pépite dévissa un panneau de départementale
il faut dire que son oncle était capable de soulever mon copain
paumes contre tempes plus d’une minute
la fille du patron s’appelait Christelle faisait du 105 E
elle jouait au volley à Tournay
Christophe cassait les verres avec ses dents
il était allé à Saint-Tropez
et prenait les ronds-points à l’envers au volant d’une 205 Rallye
première du canton à avoir un poste chargeur CD. »

Je précise que ce livre, publié dans la collection Poéfilm des éditions Lanskine, qui est vendu au prix de 12 €, est acommpagné d’une création filmée autour de la lecture du texte, à découvrir sur le site de l’éditeur : http://www.editions-lanskine.fr 

mercredi 6 septembre 2017

"Haïkus des quatre saisons", de Marie-Anne Bruch



Publiés dans la collection Encres Blanches des éditions Encres Vives, ces 60 « Haïkus des quatre saisons » de Marie-Anne Bruch m'ont plu par leur naturel.

Il m'est difficile de résumer mieux les choses. Naturel, c'est à dire pour moi, volonté de ne pas offrir d'aspérités de style pour montrer qu'on écrit bien, mais simplement exprimer ce qui peut être dit en trois vers, les seules aspérités naturelles étant celles des instants de la vie.

Je ne sais pas s'il s'agit de vrais haikus, mais je m'en fiche, car ces derniers savent saisir cette singularité de l'instant qui met son grain de sable dans les habitudes, notamment visuelles du « tout est en place », alors que rien n'est jamais en place.

Extraits des « Haikus des quatre saisons », de Marie-Anne Bruch :

« La voix chaleureuse
rit au bout du fil
- erreur de numéro.

*

« Pour la Saint-Sylvestre
La forêt a les cheveux blancs,
et de longs bas noirs. »

*

« Selon Beigbeder
l'amour dure trois ans
- grand rire à deux. »

*

« Grâce à notre amour
je pense moins à la mort
et plus à la vieillesse. »

*

« Voyant trois pigeons
perchés sur une rambarde
penser à Hitchcock . »

La quatrième de couverture est de Denis Hamel, l'illustration de couverture, de l'auteur.

Pour en savoir plus sur ces « Haikus des quatre saisons », de Marie-Anne Bruch, qui est vendu au prix de 6,10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://encresvives.wix.com/michelcosem 

mardi 5 septembre 2017

"Encore Plus Nu", de Jean Azarel et Hérold Yvard


« Encore Plus Nu », de Jean Azarel, emprunte son titre et sa page de couverture (photographie de PI) au livre du même nom, publié par les éditions Gros Textes, que j'ai chroniqué il y a un mois environ.

Il s'agit d'un Compact Disc (CD) des poèmes de Jean Azarel lus par lui, avec à la musique et aux arrangements Hérold Yvard, qui joue de la guitare et utilise d'autres instruments virtuels (le son d'un violon, par exemple).

S'il m'a paru important d'écrire quelques mots sur ce CD, c'est parce qu'il me semble être très réussi, et avoir une vie indépendante du livre du même nom, même s'il sert à promouvoir le livre.

Les raisons d'aimer cet enregistrement de plusieurs poèmes tirés du recueil papier ne manquent pas : qualité de l'enregistrement, voix de l'auteur très audible et convenant parfaitement à la révolte et à l’humour trash de ses poèmes, musicalité de l'accompagnement, sa diversité, qui colle au type de texte lu, plus doux ou plus dur, absence de longueurs aussi, dans l'interprétation de ses morceaux, qui s'écoutent bien, car, par exemple basés sur les répétitions, en tant que poèmes-listes.

Bref, surtout si vous avez aimé la version livre d'« Encore plus nu », de Jean Azarel, je vous conseille de vous procurer ce CD, qui n'est pas vendu séparément du livre, et qui coûte donc 13 € (avec le livre), à se procurer auprès de l'auteur, 267 chemin de Cougarri 30700 BLAUZAC.

jeudi 24 août 2017

"¨Pong", de Jean-Christophe Belleveaux


Publié par les éditions de « La tête à l'envers », « Pong », de Jean-Christophe Belleveaux est un recueil de poèmes écrit « pour partie en hôpital psychiatrique », comme le précise la quatrième de couverture.

Le ton est celui de la confession : à la première personne du singulier. Et il est facile de comprendre que ces poèmes ont été écrits en hôpital psychiatrique, parfois, à cause de l'évocation du décor, mais aussi et surtout à cause de la démolition de toutes les certitudes et de la vacance qui émanent de ces textes, empreints de noirceur.

Ainsi, l'enjeu n'est pas l'extérieur (regard jeté sur l'institution psychiatrique) mais l'intérieur (regard jeté sur soi-même, qui n'est pas précisément tendre), même quand des objets familiers sont signalés.

Et l'autre enjeu est celui du style de Jean-Christophe Belleveaux, qui, quand il ajoute des mots, semble en retrancher.

En témoignent ces élans lyriques, rimbaldiens, vite raccourcis, biffés, qui laissent souvent place à des vers sans verbes et sont caractéristiques de l'écriture de leur auteur.

Extrait de "Pong", de Jean-Christophe Belleveaux :

« pire

je rêvai longs poèmes
adjectifs, titres insensés
plus encore qu'île au trésor
un fatras infernal et joli, des embarcadères, un désir

je rêvai l'accord parfait
la luxuriance, planches vermoulues
quoi ? La joie ?

Vrai, j'ai trop attendu
maintenant que soient
le sabre qui m'éventre
ou des parfums inconnus
n'est-il pas temps
de casser le piano du bastringue ?

Ah certes
les cerisiers en fleurs
la sérénité contre la peur
et ma bite dressée
bref »

L'illustration de la première de couverture est une peinture d'Amel Zmerli.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Pong », de Jean-Christophe Belleveaux, qui est vendu au prix de 14 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.editions-latetalenvers.com/

"A une absente", de Claire B. d'Azoulay

Éditée par « La Porte », cette plaquette de courts poèmes en vers m'a étonné par sa fraîcheur de ton et son ambiance de village parisien.

L'auteur évoque ici les souvenirs vécus avec son ancienne amante, sans que le passé appelle les larmes ou même la tristesse.

Ce recueil est à lire pour sa sincérité d'expression.

Ci-après, trois extraits de « A une absente », de Claire B. d'Azoulay :

« Ta chambre douce dans le dix-septième
Près du local à poubelles
Mais c'était bien toi la reine »

« Et le parquet
Qui ployait sous les livres
Et nos deux cœurs
Qui se déployaient libres. »

« Au ramassage de cailloux
Entre mer et falaise
Tu étais encore
Bien plus folle que moi »

Si vus souhaitez en savoir plus sur « A une absente », de Claire B d'Azoulay, qui est vendu au prix de 4 €, vous pouvez vous adresser à l'éditeur : Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin 02000 LAON.

samedi 12 août 2017

"Je t'écris fenêtres ouvertes", d'Isabelle Alentour


Publié par les éditions « La Boucherie littéraire », dans la collection « La feuille et le fusil », « Je t’écris fenêtres ouvertes », d’Isabelle Alentour, décrit, comme dans une symphonie classique en quatre mouvements, les divers états d’une vie intérieure (et extérieure) marquée par la rencontre, puis la séparation d’avec l’être aimé.

Dans ce livre, le lecteur retiendra avant tout la conscience de son propre corps, qui exprime l’amour, même dans la séparation.

Dans la dernière partie, la pensée de l’aimé va même jusqu’à faire revivre le monde autour.

Extrait de « Je t’écris fenêtres ouvertes », d’Isabelle Alentour :

« Mon cœur à travers la croisée qui rejoint les étoiles
Là où je te pense
Là où     nue
Je te découvre me                              manquant

Et mon bras sans penser qui s’élève et ce geste une main qui approche la peau sans savoir et ce doigt qui effleure d’abord comme s’il n’osait pas ne se souvenait pas et puis qui                             et ce doigt qui se pose sur la bouche et qui touche et qui glisse une lèvre la deuxième et savoure et puis caresse encore et ranime de loin de très loin souvenir enchanté

Le baiser »

Je signale également que ce livre comporte une couverture et un corps de texte tout bleus, qui ajoutent à la classe de l’ouvrage.

Pour en savoir plus sur « Je t’écris fenêtres ouvertes », d’Isabelle Alentour, qui est vendu au prix de 16,50 €, rendez-vous sur le site de l’éditeur : http://laboucherielitteraire.eklablog.fr

Ce livre est disponible sur commande dans toutes les bonnes librairies de France et de Navarre.

"Loin le seuil", de Fabrice Farre



Publié par les éditions de La Crypte, « Loin le seuil », de Fabrice Farre se compose de courts poèmes en vers libres, qui se transforment parfois en poèmes en prose.

En lisant ce recueil, j’ai l’impression d’assister à la projection d’un film surtout muet. Même si le « je » et le « nous » sont souvent ici présents, ils sont comme étrangers à eux-mêmes et regardent le monde défiler dans une vitrine.

Chez Fabrice Farre, c’est vraiment le sens de l’observation, extérieur, puis intérieur, qui l’emporte sur toute autre permanence des choses et des êtres. Et pourtant, derrière le spectacle qui se déroule sous les yeux de l’observateur, subsiste un regard humain.

Les poèmes de Fabrice Farre, dans leur brièveté, enferment tout un monde qui fait oublier que ces poèmes sont brefs.

Extrait de « Loin le seul », « Réel » :

« La porte s’ouvrira, comme la fenêtre avec le soleil, vous me donnerez à boire après avoir quitté votre chambre. Vous me direz, dans le désert de mes paroles, que je dois mourir de soif. Vous m’aurez salué au préalable, oui, sans vous inquiéter de ma présence ou de mon absence et vous m’aimerez autant que ce qui nous lie l’un à l’autre, à traverser ainsi les jours de lieu en lieu, de visage en visage, en parfaits voyageurs désargentés. »

Les poeysages d’Anael Chadli illustrent la première de couverture, ainsi que les pages intérieures des deux parties qui composent ce livre.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Loin le seuil » de Fabrice Farre, qui est vendu au prix de 14 €, rendez-vous sur le site de l’éditeur : http://www.editionsdelacrypte.fr/

"Vivre c'est oublier qu'on est mort", de Fabrice Marzuolo


Publié par les éditions du Contentieux, « Vivre c’est oublier qu’on est mort », de Fabrice Marzuolo est une suite de poèmes en vers libres, qui comporte aussi quelques textes en prose.

Dans ses textes, l’auteur identifie avec exactitude – me semble-t-il – notre place dans la société d’aujourd’hui, celle des assis (de Rimbaud ?), qui sont prêts à gober tout ce qu’on tente de leur faire avaler : c’est la place des bons consommateurs (d'ailleurs, le titre de ce livre résume tout).

Partant de situations quotidiennes, de ce qu’il voit autour de lui ou la télé, Fabrice Marzuolo s’emploie inlassablement à nous désillusionner sur nos pouvoirs : il n’y a pas forcément du désespoir là-dedans, car la conclusion est invariable : on se fait toujours avoir, ce qui ne nous empêche pas de continuer à survivre.

La cible de Fabrice Marzuolo est aussi ces écritures trop certaines de leur confort, qui ne font que relayer notre situation d’esclaves, constat que je partage également. Car une écriture, ce n’est pas que des mots, c’est une vision du monde.

Enfin, dans la dernière partie du recueil, à travers des textes plus longs que les autres : « La conquête de l’espace » et « Immondicités », l’auteur résume ce qui est, pour lui, l’existence humaine : quelque chose de déjà fini dès que ça a commencé.

Net et précis, le style illustre ce propos. La chute des poèmes les ferme comme des sacs bien cousus.
Extrait de « Vivre c’est oublier qu’on est mort », « La danse de Jean-Baptiste » :

« Dans la voiture wagon
du RER système D pire
entre Paris et mourir
musique exotique à fond

que faire – demander de la mettre en sourdine
et dans cette Babel sur rails
provoquer la bagarre générale
à moins de subir – souffrir sa ruine
s’en accomoder
jusqu’à trouver l’ambiance géniale

par manque de tripes
se mettre à improviser une danse du ventre ».

L’illustration de couverture est de Pascal Ulrich.

Si vous souhaitez en savoir plus sur « Vivre c’est oublier qu’on est mort », de Fabrice Marzuolo, qui est vendu au prix de 10 €, contact de l’éditeur : romanrobert60@gmail.com