mercredi 30 septembre 2015

"Les propos décousus du pouët incongru", de Gérard Lambert-Ulmann


C'est un pouët incongru qui n'est pas dépourvu de raison, pour un poète. C'est sans doute pour cela que c'est un pouët incongru.
A travers cette série d'aphorismes, Gérard Lambert-Ulmann nous fait part de sa philosophie de sa vie, qui est aussi poésie, une philosophie de looser diront les "gens du commun". Une vraie philosophie de poète, diront les poètes, et quelques autres, admiratifs en secret d'un parcours de poète (car il ne faut pas le montrer hein).
Comme dit le pouët incongru : "Vous me demandez, dit le pouët incongru, quel est le secret de mon incroyable réussite dans l'échec ? Je n'ai jamais été assidu aux cours de génuflexion; je n'ai jamais bien su passer la pommade (sauf pour guérir quelques bobos d'enfants); je n'ai jamais bien su lécher (sauf quelques amantes); j'ai toujours eu la langue bien pendue (en évitant qu'elle le soit aux réverbères) et le bras d'honneur assez prompt. Grâce à ça je peux aujourd'hui m'approprier la célèbre phrase de Groucho Marx : "Parti de rien, je ne suis parvenu à rien. Mais... tout seul"."
Ce n'est peut-être pas de la poésie, en tout cas, c'est de la vie. Merci à toi, en tout cas, pouët incongru, pour ta saine attitude et ta franchise !
Quant à la poésie, là voilà qui s'exprime :
"Une petite bestiole noire à huit pattes grime sur la jambe du pouët incongru. Il s'exclame : Si l'espoir du soir persiste à me grimer dessus de cette manière je vais finir par lui préférer le chagrin du matin".
Aussi vrai que : "C'est vrai : la poésie ne mène nulle part, dit le pouët incongru, mais j'aime cheminer à ses côtés".

Si vous souhaitez en savoir plus sur "les propos décousus du pouët incongru", publié par "Les coudées franches", un éditeur portant bien son nom, en l'occurrence, eh bien, écrivez moi (je n'ai aucune adresse à vous proposer, en dehors de la postale de Gérard Lambert-Ulmann).

mardi 29 septembre 2015

"Un cri dans le ciel", de Murielle Compère-Demarcy



"Un cri dans le ciel", de Murielle Compère-Demarcy, qui vient de paraître aux éditions La Porte, se décline en deux poèmes (semble t-il) unis par le trait d'union de la pluie.
La première partie de "Un cri dans le ciel" est la description poétique d'un matin humide que traverse le chant des oiseaux, le deuxième poème était un hymne en réduction (de quelques courtes pages de vers courts) à la pluie, à travers le prisme d'une histoire racontée à un enfant.
Le lecteur de "Un cri dans le ciel" retrouvera le style si caractéristique de Murielle Compère-Demarcy, marqué par son rythme syncopé, orné de barres de séparation, de caractères différenciés (en italique par exemple).
Pour l'auteur, la pluie, loin d'être envisagée sous l'aspect dépréciatif des vendeurs de soleil en exclusivité, est synonyme de renaissance à la vie et de purification, de transition vers le soleil justement, après une averse. 
Cette approche optimiste, comme l'écrit l'auteur à un moment, tient du conte et du merveilleux, tout en échappant à la mauvaise naïveté des adultes qui essayent de parler enfant.
Voici un extrait de "Un cri dans le ciel" :

"Des baffles de la pluie
dans l'enceinte de lune
aux bris de cristal sur le bois
de la chambre /
Dans les enceintes de corne entonnés
aux spectres des marins /
Dans le kaléidoscope
des paysages d'elfes /
de contes de fées
parasismiques
Pluie raconte son histoire
emplie d'une enfance tellurique
élémentaire /
à l'école

Pluie à l'âge d'une petite fille
à l'écoute depuis
des rus de vapeur /
sur un monde en verre..."


Pour vous procurer "Un ciel dans le ciel" vendu au prix de 3,80 €, vous pouvez écrire à l'éditeur : Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin 02000 LAON.

jeudi 17 septembre 2015

Jan Bardeau & compagnie


Drôle de vie que celui-là. Drôle dans tous les sens du terme. Drôle comme original et comme marrant (et en même temps pas marrant).
C'est l'histoire d'un mec perdu dans les méandres d'une ville trop immense pour lui. Car elle est partout, cette présence féminine (car la ville est féminine). Elle c'est aussi une femme, elle c'est encore une senteur, ou bien une fleur, quelque chose qui donne envie de bouger, même si ce n'est que les yeux. 
Car bien entendu, dans une ville, il y a aussi les méchants anonymes. Ceux qui hantent les pavés. Nous-mêmes, quand nous voyons la misère allongée sans bouger le petit doigt, ou quand nous nous subordonnons à la machine bien huilée de l'emploi salarié.
Heureusement que cette soif de liberté redonne des couleurs à ce qui n'en a pas d'ordinaire. Et l'auteur s'amuse avec les choses de la vie, en leur donnant des dimensions minuscules par la parole. 
C'est que Jan Bardeau écrit sous les contraintes. Celles-ci sont de plusieurs sortes : ne jamais utiliser les auxiliaires être ou avoir, ne jamais utiliser dans deux textes différents les mêmes verbes et substantifs.
Ceci étant dit, ces contraintes n'entament pas la volubilité de l'auteur. Sauf peut-être, que plus on avance dans le recueil, plus les textes deviennent étranges. Et la contrainte apparente (qui n'en est pas une), c'est de constater l'existence de nombreux jeux de mots basés sur des assonances. Et à la fin, le lecteur découvre le babil du nouveau-né, avec le vocabulaire en plus :

"Ouf, le ruisseau t'embaume baba, baba bois, bois baba, les douleurs s'estompent, leurs morsures guettent toutefois, baba là-bas t'extirpe de toi, baba, sous le bât, oh baba, l'onde féconde délate la graisse de l'usine, baba, et ton ancienne faconde exploserait presque le béton de ta parole d'ouvrier, baba, le bois ramage et grignote et gigote, baba, ouf, sous l'ombrage des frondaisons, baba, ils ne te rabattront pas, ne te choureront pas ton choix;
baba ne balbutie pas, il souhaite adieu;
plus de baba".

Bref, une véritable expérience d'écriture qui se caractérise par sa richesse créative.
Alors, me direz-vous : qu'en est-il du "Et compagnie" ? Dans ce recueil qui fait partie de cette collection pilotée par Walter Ruhlmann, la compagnie c'est celle des illustrations de Sébastien Russo, de l'expressionnisme en BD, que j'aime beaucoup. Quant à la couverture, elle est superbe et est traversée par l'homme qui ne riait jamais (mais qui nous fait rire) : Buster Keaton.

Pour vous procurer "Jan Bardeau et compagnie", vendu au prix de 5 € (+ frais de port), vous pouvez aller faire un tour sur le blog de l'éditeur (Walter Ruhlmann de mgv2>publishing) : http://mgv2publishing.blogspot.fr/ 

"De guerre lasse", d'Alain Jean Macé


"De guerre lasse" est un court recueil de poèmes en vers qui porte bien son titre.
Contrairement aux apparences (de nos pays développés) et vu le nombre de conflits ayant lieu en cet instant dans les pays en voie de développement, l'antimilitarisme ne va décidément pas de soi, il faut croire...
C'est bien d'ailleurs de ces conflits plus récents (au Rwanda, en Egypte) dont il est question également dans "De guerre lasse" et qui sont dénoncés.
Et si ces poèmes sont joliment troussés par des jeux de mots, l'auteur n'oublie pas que la guerre n'est pas jolie. Tant pis pour toi Apollinaire !

"Sang soif

Boum ! Une bombe tombe
Sur la place du puits
Et du seau d'eau rempli
Par un adolescent
Ne reste que le sang

Larme au fond d'un cratère
Ivre d'obus
La terre
Cette fois ne boit plus
Eau
       Sang
                 Paroles"

Et lorsque Alain Jean Macé s'autorise, en fin de poèmes, un brin d'espoir, je n'y "croix (de) guerre" (hélas).

Pour vous procurer "De guerre lasse", vendu au prix de 3,80 €, vous pouvez écrire à l'éditeur (La porte) : Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin 02000 LAON).

lundi 14 septembre 2015

"Contrats", d'Hervé Federspiel


"Contrats" d'Hervé Federspiel est un volume de près de 200 pages, composé de trois nouvelles, intitulées : "Histoire de Colette", "En parallèle" et "II".
Chacune de ces trois nouvelles est relative à trois personnes d'âges et de préoccupations différentes, qui se débattent avec leur quotidien.
Pour donner une idée de l'ambiance du livre, plus que pour parler d'influence, je citerais les livres de Michel Houellebecq, qui se déroulent dans des horizons communs.
En effet, deux des trois personnages de ces "contrats" sont obsédés par leur sexualité, du fait bien entendu qu'ils sont aux prises avec leur propre misère sexuelle. Et dans tous les cas, l'amour est souvent escamoté par la vulgarité de la vie quotidienne ou de la sexualité, envisagée de façon clinique.
La deuxième nouvelle, intitulée "En parallèle", ne me semble pas placée par hasard dans ce livre. car j'ai l'impression qu'elle se déroule "en parallèle" aux deux autres histoires. Le "je' renvoie aux "Elle" ou "Il" et peut passer pour signe d'autobiographie, ce qui n'a aucune importance d'ailleurs. Cette nouvelle a l'air aussi de se situer dans le passé, contrairement à l'action des premier et troisième texte.
Dans ces trois histoires, il y a un côté décadent très prononcé, la vie des trois personnages semblant être un naufrage progressif, qui se double, dans la deuxième nouvelle, d'une attirance pour les ambiances gothiques, à travers la musique, les ruines et la nuit.
N'allez pas croire toutefois que "Contrats" soit dépourvu d'humour. Par exemple, dans "II", il est question de l'élevage d'un enfant par son père, car c'est bien d'élevage qu'il faut parler, même s'il s'agit d'un cauchemar qui pourrait dégoûter des futurs parents.
Cependant, le recours aux objets, leur irruption incongrue, finit par créer comme des effets de gags. Il y a aussi, de brusques accélérations de temps qui laissent à penser qu'après tout, les malheurs vécus par les personnages principaux sont plutôt bien vécus sur le long terme. Ainsi, contre toute attente, ces raccourcis de vies contribuent à la fois au réalisme des nouvelles et à la singularité de l'approche.
Voici le tout début de "Histoire de Colette" :
"Chaque matin, Colette se lève à sept heures et quart. La veille, l'étudiante aura réglé son radio-réveil à sept heures, se réservant ainsi un sas en demi-sommeil avant de quitter la tendre tiédeur des draps. Colette ne se lave jamais le matin ni ne se maquille, elle passe en hâte des vêtements pliés sur une chaise et dans ses pieds le chat miaule plus fort s'il le faut afin d'obtenir sa ration. L'odeur de pâtée parvient aux narines de Colette, une farce de troisième choix mélangeant aromates artificiels avec ce qui pourrait être des abats ou des os".
Enfin, je me suis demandé quelle était la signification du titre du livre : "Contrats". Peut-être s'agit-il d'une allusion aux relations humaines, et particulièrement à celles vécues à deux (homme - femme, père - fils) qui relèvent finalement du contrat "librement consenti", mais difficile à défaire...

Pour vous procurer "Contrats", d'Hervé Federspiel, vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : Don Endia,http://editions-donendia.com/
Vous pouvez également aller faire un tour sur le site de l'auteur, http://hervefederspiel.com/

mercredi 9 septembre 2015

"S'il existe des fleurs", de Cécile Guivarch


Ce recueil de Cécile Guivarch, édité par "L'arbre à paroles" et intitulé "S'il existe des fleurs", constitue la description d'une campagne marquée par la guerre.
Ces courts poèmes en vers libres (cinq vers au maximum) me semblent être une évocation de la guerre des tranchées qu'a connu la France de 14-18.
Cependant, rien n'est sûr et peu importe, puisque toutes les guerres sont à condamner. A l'incertitude de la guerre concernée répond l'invisibilité de ses traces.
Tout au plus se devine-t-elle. Elle s'imagine surtout. Avec sobriété, Cécile Guivarch témoigne de la difficulté de remettre de la vie là où la guerre est passée.
Et cela est très bien résumé par ce poème, l'avant-dernier du recueil, qui lui donne son titre :

"s'il existe des fleurs
qui se donnent au jour
crient sous les pieds des soldats
devrions nous mourir le soir
ou bien fleurir des tombes"


Pour en savoir sur "S'il existe des fleurs", de Cécile Guivarch, livre vendu au prix de 12 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur :http://maisondelapoesie.com/

dimanche 6 septembre 2015

"Vos discours ne passent plus", de Thierry Radière


Avec "Vos discours ne passent plus", que viennent de publier Paul Guiot et Eric Dejaeger dans la collection des Minicrobes, en complément de la revue Microbe, le "problème" - mais s'agit-il d'un problème ? - est que l'on risque de ne parler que du fond du texte. Pour une fois !
En effet, cette suite de poèmes "en colère" dénonce le pouvoir politique et économique actuel.
Difficile donc, à moins d'avoir un cerveau monté à l'envers ou d'avoir gagné le jackpot, de ne pas se situer d'emblée sur la même longueur d'ondes que Thierry Radière, en lisant ces poèmes qui paraissent très clairs à 150% !
Ce ne sont bien sûr que des poèmes, oui, mais des poèmes engagés.
Il n'empêche : je reconnais bien dans "Vos discours ne passent plus" la manière d'écrire de Thierry Radière qui compose des strophes en vers presque justifiés, et riches d'enjambements, ce qui a pour effet d'installer le discours dans la continuité du présent (hélas).
Je cite la première page :

"Les discours ne passent plus
même devant le monument
aux morts la patrie est une
invention que les soldats ont
comprise une fois dans leur
tombe les drapeaux sont de
vaines excuses un moyen
tricolore de faire croire à
la gloire au recueillement
mais jamais à la paix jamais"

Je précise que l'illustration de couverture est de José Mangano et la 4e de couv de Paul Guiot).


Les 5 Minicrobes sont vendus avec 9 numéros de la revue Microbe aux prix précis de 19,8 €. Pour en savoir plus,http://courttoujourshautetfort.com/

samedi 5 septembre 2015

"Demeures de l'éveillé", de Béatrice Libert



Il est rare que je rédige la chronique d'un recueil primé. Non, non, je ne suis pas en train de tomber malade, rassurez vous.
Il n'en reste pas moins que "Demeures de l'éveillé" de Béatrice Libert a obtenu le prix d'édition poétique de la ville de Dijon 2015.
Le recueil est divisé en trois parties : trois demeures nommées "Lisibles chemins", puis "Précaire abri", et enfin "Petites prières pour ne pas mourir de froid".
Ces demeures, plus mentales que physiques, exercent leur pouvoir de consolation sur le psychisme de l'auteur comme sur celui du lecteur.
"Demeures de l'éveillé" est un recueil classique, à la fois par le style et par les thèmes (paysages, poésie). Cela ne l'empêche pas d'être impeccablement écrit, ce seul constat justifiant à lui seul et à mes yeux la présente chronique.
Un exemple ci-après :

"Objets perdus

Avec le nom égaré des objets perdus
Nous écrirons une autre fable
Mue par l'absence de locataires

Quelqu'un debout à la fenêtre
Du vide estampillé annoncera
Les errants et les ombres

Où serons-nous dans ce charivari ?
A quelle page du non-récit ?
Atteindrons-nous la banlieue du miracle ?

Quels verbes devrons-nous
Contraindre au présent de l'amour ?"

Pour en savoir plus sur ce recueil, vendu au prix de 10 €, qui est édité par l'association "Les poètes de l'amitié", vous pouvez contacter son concepteur, Stephen Blanchard, au mail suivant : aeropageblanchard@gmail.com

Et si vous souhaitez participer au prochain concours (édition 2016), vous pouvez encore vous inscrire jusqu'au 30 septembre prochain (même contact). 

"Jour de congé", de Christian Degoutte



"Jour de congé" est un très joli recueil de poèmes et d'images, écrit par Christian Degoutte et illustré par Jean-Marc Dublé.
Les illustrations sont des enveloppes décorées que l'on devine adressées par l'illustrateur à ses amis et connaissances. Idéal pour avoir de nouvelles adresses de nouveaux contacts (non, je ne vous les donnerai pas).
Quant au texte, je partage et ressens complètement son ambiance. C'est l'histoire d'une cycliste, toujours nommée ainsi, qui traverse différents paysages plutôt ensoleillés en ce "jour de congé". Et l'auteur décrit, en treize poèmes, les impressions de la cycliste, ce qu'elle voit.
Il y a un côté voyeur pudique dans ces poèmes nous imaginons la cycliste séduisante, et les passants du poème la regardent également). Mais pas seulement. Loin de là.
Car, pour ma part, je suis à la fois dans la peau de la cycliste en balade et dans les paysages qu'elle décrit. Pour pratiquer aussi le vélo, je confirme : c'est exactement ça qui se passe. Beaucoup de petites choses en fin de compte.
A noter que l'art du poète, Christian Degoutte (tout en vers enjambant la bécane), consiste à décrire précisément ce qu'il y a à voir, mais de l'intérieur... Et si la poésie n'était rien d'autre que cela ?

"Rugissements de moteur, klaxon lui jappant
aux fesses, folle en roue libre, sur l'azur nu
d'un gouffre, sans toucher aux freins, elle salue
la graine qui a élu le bord du ravin.

Au pin tordu qu'elle est devenue, elle crie
ce qui lui file par la tête : en poésie,
c'est par l'oreille qu'on a soif ! Indifférente
à la bagnole qui la dépasse et beugle".

Pour vous procurer "Jour de congé", édité par Thoba's éditions, et vendu au prix de 10 € (+ 2,50 € de frais de port), rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.thobas-editions.fr
Le livre peut être commandé à l'adresse de l'auteur ou de l'illustrateur (et sera posté dans une enveloppe décorée par ce dernier), contact : degoutte.christian@wanadoo.fr